« Feuillets d’Hypnos, 1943-1944 » de René Char a été publié à la NRF en 1946 sous le nom de « Feuillets d’Hypnos ». Cette édition ne contient donc pas la dédicace postérieure à Albert Camus.
I) – La reliure de « Feuillets d’Hypnos »
Il s’agit d’un plein maroquin rouge sous étui, reliure janséniste.
Gardes en soie verte (moire), listels marrons, charnières en cuir.
Tranchefile chapiteau bicolore
L’étui est doublé intérieurement en moire.
La couvertures et dos sont conservés.
Relié en mai 2000.
II) – Le livre
René Char (1907-1988). « Feuillets d’Hypnos 1943-1944 » (1946)
a) carnet d’Hypnos
Après sa traversée dans le groupe surréaliste, le poète se tait. C’est le temps de l’action armée.
Tout d’abord, René Char s’engage dans l’armée en 1939.
Tandis que Breton et d’autres s’exilent, René Char s’installe en 1941 dans la clandestinité entre Cereste, Cabrières et Gordes dans le Vaucluse.
Puis, en 1942, René Char, alias Capitaine Alexandre, entre dans la Résistance.
Enfin, de 1943 à 1944, c’est depuis Cereste qu’il dirige la S.A.P. des Basses Alpes (Section atterrissage-parachutage). Son nom de code est Hypnos. Durant cette période, il tient un journal de bord personnel : « Carnet d’Hypnos ».
C’est dans ces conditions qu’il est appelé par l’état-major allié d’Alger pour préparer le débarquement en Provence.
Le carnet d’Hypnos fut enfoui en juillet 1944, lors de mon départ pour Alger, dans le mur d’une maison à demi démolie. Je le retrouvai à mon retour, et en détruisis, pour des raisons personnelles, la plupart des pages. Un feuillet fut conservé comme témoin.
b) Feuillets d’Hypnos
Plus tard, c’est à partir de ses souvenirs de ce carnet que René Char écrit « Feuillets d’Hypnos ».
En 1946, Albert Camus décide de publier « Feuillets d’Hypnos » dans la collection Espoir de la N.R.F. Cette rencontre marque le début d’une grande amitié. Si bien que « Feuillets d’Hypnos » qui a reçu un accueil triomphal sera réédité en 1948 dans « Fureur et Mystère » et dédicacé à Albert Camus.
« Feuillets d’Hypnos » 1943-1944 est un livre particulier dans l’œuvre de rené Char : il réunit 237 fragments numérotés de longueur inégale, à la façon des « Pensées » de Pascal. L’édition originale se conclut par un texte sans numéro intitulé « La rose et le chêne ».
La mention 1943-1944 renvoie « Feuillets d’Hypnos » à un contexte particulier. C’est pourquoi certains fragments se rapportent à l’action clandestine (réception des colis parachutés, exécution de Roger Bernard, portraits de ses compagnons de combat ou encore l’assaut de Cereste par les allemands). D’autres sont des méditations parfois déroutantes et surgissant de ci de là des vers aphoristiques si reconnaissables.
Ainsi René Char est là debout, réfractaire dans toute sa force et sa violence.
III) – L’exemplaire
Un volume in-16 double couronne, un des vingt-trois exemplaires sur vélin pur fil Lafuma Navarre, seul grand papier.
La bande et l’encart publicitaire ont été conservés.
Par ailleurs, entre le faux titre et le titre, René Char a recopié à la plume le poème « La rose et le chêne ».
Exemplaire dédicacé à des amis résistants.
Tu parles encore de drogue
Belle reliure pour ces feuillets qui furent cachés dans les pierres d’un mur.
Pour moi, Feuillets d’Hypnos est une entéléchie lavée dans le grain de cette reliure.
Au sens de Leibniz ou de Balzac?
Comme il vous plaira mais de façon certaine le passage de la puissance à l’acte dans l’être même>.